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Séminaire

Habitabilité de la Terre et transitions justes. La transition énergétique

ATTENTION : le séminaire débutera à 14h30 

Cycles de séminaires organisés par Nastassja Martin, titulaire de la chaire de professeur junior Habitabilité de la Terre et transitions justes.

Thème 2024-2025 : la transition énergétique

Des chercheurs de différents horizons théoriques seront invités à partager leurs travaux et réflexions dans le cadre du séminaire pluridisciplinaire "Habitabilité de la Terre et transitions justes". Ce cycle de séminaires se déroulera sur toute la durée de la chaire, à raison de quatre séances par an. Trois grands thèmes seront abordés durant ces trois ans : la question climatique, la transition énergétique et les réponses alternatives aux crises systémiques.

L’idée qu’un nouveau modèle énergétique se substituera à l’ancien pour apporter un panel de solutions technologiques efficace est aujourd’hui largement consensuelle. Les énergies « vertes » remplaceront les énergies carbonées ; elles seront durables et soutenables et permettront, en réduisant les émissions, de préserver l’habitabilité de la terre. Du Chili au Mexique en passant par la France, nous étudierons les propositions technologiques actuelles qui permettent de répondre à la question climatique. Hydrogène vert, éolien, expansion ou réouverture des mines, champs de panneaux solaires : nous tenterons de faire un inventaire des projets en cours, en nous centrant sur l’étude de certains projets exemplaires. Il s’agira non seulement de décrire ces projets, mais aussi de documenter le maillage institutionnel et entrepreneurial qui les rend possibles voire désirables, en même temps que le contexte culturel et politique dans lesquels ils s’inscrivent. Si nous devons, depuis les SHS, travailler à l’émergence de nouvelles réponses face à la crise en cours, il nous faut commencer par enquêter sur le régime des réponses modernes et technologiques à l’œuvre actuellement. C’est seulement après que nous pourrons réfléchir aux autres types d’approches qui ne passent pas par le techno-solutionnisme. 

Programme 2024-2025

Vendredi 20 décembre 2024 : dialogue entre Jean-Baptiste Fressoz et Aline Nippert

Jean-Baptiste Fressoz

La « transition énergétique » repose sur un certain passé. Sa force de conviction tient à son caractère ambigu à cheval entre histoire et prospective. Tout comme par le passé l’humanité aurait accompli des transitions, il nous faudrait, confrontés au changement climatique, en accomplir une nouvelle, vers le nucléaire et/ou les renouvelables. Faire face au défi climatique impliquerait donc de poursuivre l’histoire de la science, de l’innovation et du capitalisme, de la guider, de l’accélérer, pour hâter l’avènement d’une économie décarbonée. Grâce à la transition énergétique, le changement climatique n’appelle qu’un changement d’infrastructure et non de civilisation. Le problème est que ce futur réconfortant repose sur un passé imaginaire, sur une histoire matérielle fausse, scandée par une succession d’époques. Les sources d’énergies entrent en symbiose autant qu’en concurrence et ces relations symbiotiques expliquent pourquoi, au cours des XIXe et XXe siècles, les énergies primaires ont eu tendance à s’additionner plutôt qu’à se substituer. Pourquoi alors la notion de transition énergétique s’est-elle imposée ? Comment ce futur sans passé est devenu, à partir des années 1970, le futur de nos gouvernants, le futur des cabinets de conseil et des organisations internationales, bref, le futur des gens raisonnables.

Jean-Baptiste Fressoz est historien des sciences, des techniques et de l’environnement, chercheur au CNRS au Centre de Recherches Historiques de l’EHESS. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont L’Apocalypse joyeuse. Une histoire du risque technologique (2012), L’Événement anthropocène, la terre, l’histoire et nous (2013, 2016, avec Christophe Bonneuil),  Les Révoltes du Ciel. Une histoire du changement climatique (2020 avec Fabien Locher) et Sans transition. Une nouvelle histoire de l’énergie (2024).

Aline Nippert

Si la « question climatique » occupe bel et bien la scène politique mondiale, les politiques publiques et réglementations mises en place dans l’optique d’atténuer l’emballement climatique visent principalement à soutenir le déploiement de tout un arsenal technologique jugé « propre » (énergies renouvelables et nucléaires, véhicules électriques et autres carburants « durables »), ainsi qu’à encourager le développement de techniques « innovantes », plus efficaces en matière et en énergie. Dans une telle perspective technosolutionniste, un élément chimique, le plus simple du tableau périodique de Mendeleïev et le plus abondant de l’Univers, cristallise tous les fantasmes : l’hydrogène (H2).
Comme l’industrie de l’hydrogène s’appuie sur l’ensemble des technologies « vertes » (solaire, éolien, nucléaire, batteries, captage-stockage de CO2), chargées de réduire massivement les émissions de CO2 d’origine anthropique, mon enquête raconte, exemples à l’appui, l’impasse vers lequel le projet politique de la croissance verte nous embarque collectivement. Je reviendrai sur les espoirs – sans doute sincères – et l’enthousiasme – sans doute excessif – que suscite le « totem de la croissance verte » pour lutter contre le changement climatique. Je m’attarderai sur les acteurs – plébiscités pour leur « expertise » – qui promeuvent la mise en place d’un marché mondial de l’hydrogène, et je proposerai des éléments de réflexion sur le terreau idéologique sous-jacent à la volonté de faire émerger une « économie hydrogène ».

Aline Nippert est journaliste scientifique et autrice (Hydrogène Mania. Enquête sur le totem de la croissance verte, le passager clandestin, 2024). Spécialiste des enjeux de décarbonation et stratégies de procrastination de l’industrie, elle suit les évolutions du secteur de l’énergie pour la presse professionnelle et grand public.

Vendredi 21 février 2025 : dialogue entre Arnaud Orain et Pierre Charbonnier

Vendredi 28 février 2025 : dialogue entre Christophe Bonneuil et Alexander Dunlap

Vendredi 28 mars 2025 (à Millau) : dialogue entre Philippe Descola et Vinciane Despret

Informations pratiques

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, centre Lourcine
1 rue de la Glacière, 75013 Paris
Bâtiment 1 Suzanne Bastid, 2e étage, salle 13

Inscription obligatoire : à l'issue de l'inscription, un message de confirmation vous sera envoyé avec un billet PDF en pièce jointe. Ce billet, accompagné d'un document d'identité, est indispensable pour accéder à l'événement.