Les populations de la privation de liberté
La « population pénale » désigne communément les personnes « placées sous main de justice », qu’elles soient incarcérées (on parle alors de « population carcérale ») ou suivies en milieu ouvert. L’emploi du singulier semble réducteur pour refléter la diversité – des profils pénaux, des origines sociales, des stades procéduraux ou encore des régimes de détention – qui marque ces personnes.
Cet ouvrage est une invitation à s’intéresser, au-delà des personnes privées de liberté et de « la » population pénale ou carcérale, aux « populations privées de liberté ». De l’Europe (France, Italie, Belgique) à l’Afrique (Kenya, Niger) en passant par l’Amérique latine (Brésil, Colombie), ces populations ont en commun de se situer à la confluence entre précarités socio-économiques (les pauvres, les étrangers) et inégalités de genre (les femmes, les transgenres). Entre régimes d’incarcération classiques (exécution de peine, détention provisoire) et d’exception (détenus mafieux et terroristes en Italie, détenus de Guantanamo), c’est le sens même de la privation de liberté que l’approche par populations interroge à la frontière entre prévention et punition, réinsertion et exclusion sociale.