Arne Næss, entre nature et politique
Programme
Ouverture : 9h30
Présidence : Eric Pommier (Pontificia Universidad Católica de Chile, Archives Husserl de Paris)
- 9h40 : Catherine Larrère (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS)
Arne Næss et André Gorz : quelle écologie politique ?
À partir de la comparaison entre les distinctions faites par Naess entre écologie superficielle et écologie profonde et par Gorz entre écologie scientifique et écologie politique, nous entendons attirer l'attention sur la dimension sociale et politique d'Ecologie, communauté et style de vie, trop souvent négligée.
- 10h30 : Paul Guillibert (CNRS, ISJPS)
Écologie sociale, écologie profonde, écologie politique. Histoire de la controverse entre Arne Næss et Murray Bookchin
À la fin des années 1980, Murray Bookchin, l'un des principaux théoriciens de l'écologie sociale, lance une controverse contre la deep ecology. Véritable charge politique contre la pensée d'Arne Naess, de Bill Devall et Georges Session, l'article "Social Ecology vs. Deep Ecology" de 1987 donnera lieu à une série d'articles des tenants de l'écologie sociale (Clark 1988) mais deviendra aussi un élément structurant dans la critique décoloniale de l'écologie profonde (Guha 1989). L'enjeu de la controverse se situe au niveau de la clarification des relations entre les mondes naturels et les structures sociales et en particulier sur l'égalitarisme biosphérique. Comme l'écrit Bookchin en 1987, "l'écologie profonde ignore la nature sociale de l'humanité et les origines sociales des crises écologiques" (Bookchin 1987). Cette critique a structuré de nombreux débats en écologie politique. Il est étonnant de voir comment la plupart des arguments qui s'y sont développés sont périodiquement rejoués dans l'ignorance de cette archive. Dans cette intervention, je présenterai le contexte de cette controverse, ses arguments et la manière dont ils sont réinvestis dans les débats contemporains en écologie politique.
- 11h20 : Jean-Philippe Pierron (Université de Bourgogne)
De Tvergastein à une politique de l'habiter terrestre : les sens d'un lieu
Dans son projet politique d'écosophie T., Arne Naess prend soin de laisser le T. silencieuse, pudique mise entre parenthèses, son expérience écosophique personnelle à Tvergastein. Pour quelles raisons ? Nous ferons l'hypothèse que la question d'une écologie politique profonde au regard de cette expérience personnelle y trouve son orientation et l'explication de sa finalité longue. Tout projet d'écologie politique ne doit-il pas s'entendre comme une mise en œuvre des conditions organisationnelles, institutionnelles et relationnelles rendant possible et soutenable une expérience éco sophique ? Si c'est le cas, nous chercherons à préciser tout d'abord les traits phénoménologiques de cette expérience singulière ; à expliciter ensuite comment il est possible de penser le changement d'échelle entre une expérience éthique de l’habitat et une politique de l'habiter terrestre. Pour cela nous mobiliserons une double dimension: d'une part en insistant sur le fait que contre tout dogmatisme politique violent, la proposition de Naess plaide pour un pluralisme des interprétations de ce que peut être une écosophie ; d'autre part, en notant que Naess, lecteur de Spinoza ne néglige pas le rôle que les traditions religieuses (bouddhisme, christianisme) entendues comme fait culturel total peuvent, à côté d'autres comme la philosophie, jouer un rôle relevant d'un théologico-politique bien compris.
- 12h30-14h : Pause déjeuner
Présidence : Catherine Larrère (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS)
- 14h : Emmanuel Picavet (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS)
Nature ou environnement : quelle différence pour l'argumentation ?
L'"écologie profonde" associée au travail philosophique d'Arne Naess inscrit l'homme dans une nature dont il est partie intégrante et interroge les processus qui y sont à l'œuvre. La vision du monde qui en résulte peut être mise en regard de l'inscription de la vie humaine dans un "environnement". Au-delà du contraste entre des conceptions du monde, il y a lieu de s'interroger sur les conséquences du basculement souhaité par Naess pour l'argumentation et pour la conception même des arguments normatifs en matière écologique.
- 14h50 : Rémi Beau (CNRS, IEES-Paris)
Næss et le pragmatisme : de l’empirisme sémantique à l’écosophie
Les affinités de la démarche philosophique d’Arne Naess avec le pragmatisme américain ont été régulièrement soulignées par les spécialistes du penseur norvégien. Admirateur des travaux de William James, Naess s’y réfère à plusieurs reprises au cours de sa carrière philosophique, comme en témoignent les dix volumes des Selected works. Des comparaisons ont par ailleurs été suggérées entre le projet de développement des sciences sociales porté par Naess en Norvège au lendemain de la Seconde guerre mondiale et les activités d’un autre représentant du pragmatisme américain, John Dewey. C’est, enfin, sous l’angle de son traitement de la question du pluralisme au sein de la philosophie environnementale que les rapports entre Naess et le courant pragmatiste ont été examinés. Je reviendrai dans ma contribution sur ces affinités multiples avec le pragmatisme, mais aussi sur ce qui distingue la pensée de Naess d’une approche pragmatiste.
- 15h40 : Pause
Présidence : Emmanuel Picavet (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS)
- 16h: Luca Valera (Universidad de Valladolid, Pontificia Universidad Católica de Chile)
Deep Ecology between Violence, Authoritarianism, and Inculturation: Some remarks from Naess’s ecosophy
The purpose of my presentation is to clarify some basic points of Arne Naess's politics. Although there is no systematic political theory in Naess, it is possible, in my opinion, to deduce some concrete political lines, which have to do with the use of violence and the distancing from authoritarian positions (despite the contrary being claimed). In this sense, to avoid the dangerous drift of environmental authoritarianism -such as some authors are currently advocating- a fundamental element that emerges from the same Naessian ecosophy is the respect for diversity and cultures as life forms. I will offer a clear example of how a rigid application of Deep Ecology principles at the political level can lead to conflicts, which can only be healed through the respect for local cultures.
- 16h50 : Marie-Hélène Parizeau (Université Laval, Québec)
À propos de l’engagement politique chez A. Næss : qu’apporte la pensée de Gandhi ?
Arne Næss fait explicitement référence à la pensée de Gandhi quand il décrit l’importance de l’engagement politique. L’action directe pacifique, les techniques de dialogue et de persuasion avec les opposants sont autant d’éléments de la pratique politique de Gandhi. Certes, Næss propose une plateforme d’écologie politique précise qui s’éloigne de l’anti-colonialisme de Gandhi. Je souhaite donc explorer si, en arrière-plan de son programme politique et de son écosophie, Næss emprunterait aussi à Gandhi, certains concepts plus orientaux, tels l’harmonie et l’équilibre. Je tenterai de comprendre les conséquences politiques de ces choix.
- 17h40 : Gérald Hess (Université de Lausanne)
Prolongement politique du soi écologique d’Arne Næss : communauté et pluralisme
Le soi écologique est un concept central qu’Arne Næss élabore dans le contexte d’une ontologie relationnelle. On lui reproche de manière récurrente le fait qu’il serait fondé sur une logique de l’identité : il serait, paradoxalement, une notion anthropocentrée et égocentrée. Toutefois, révisé par l’écoféminisme et replacé au sein du « mouvement » de l’écologie profonde, il est en mesure de définir autrement que ne le fait Næss (au moins) deux idées politiques centrales à la base d’une société écologique et démocratique, celles de communauté citoyenne et de pluralisme.
Clôture : 18h30
Journée d´étude organisée par Catherine Larrère (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS), Emmanuel Picavet (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, ISJPS), Eric Pommier (Pontificia Universidad Católica de Chile, Archives Husserl Paris)
Informations pratiques
En ligne
https://pantheonsorbonne.zoom.us/j/93253969670?pwd=Z2tlSjBES2FOU2dGRUI5aWdoSTlGUT09
Sur place (inscription obligatoire)
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
Campus Port-Royal - Centre Lourcine
1 rue de la Glacière, 75013 Paris
Bâtiment 1 Suzanne Bastid, 2e étage, salle 13